Par Me Christian Paré, avocat, Dunton Rainville
Rome ne s’est pas construite en un jour… Votre entreprise non plus ! Combien d’heures avez-vous passées à démarrer votre entreprise et la faire prospérer ? Avez-vous pensé à la continuation des activités une fois que vous aurez décidé de passer le flambeau ? Comment récolter l’entièreté des fruits de votre dur labeur ?
Dans cet article, découvrez l’utilité des principaux documents juridiques dans les trois principales situations de repreneuriat, familial, interne et externe, de la convention entre actionnaires jusqu’à la convention de transfert, en passant par certaines réorganisations corporatives.
La relève familiale
Plusieurs éléments doivent être pris en considération lorsqu’il est question de mettre en place une relève d’entreprise. Nous entendons souvent qu’un transfert d’entreprise se prépare longuement, surtout lorsqu’il est question de transfert familial intergénérationnel. L’une des clés du succès est de maintenir l’équilibre entre la vie familiale et la vie professionnelle ainsi qu’un dialogue ouvert entre les personnes impliquées et le reste de la famille.
Ce type de transfert étant basé sur la confiance et les liens familiaux qui unissent les deux parties, une documentation juridique adéquate est vivement conseillée afin de s’assurer de favoriser un équilibre entre l’acheteur et les autres membres de la famille. En effet, souvent, un solde de prix de vente important sera consenti, ou une cristallisation de la valeur de l’entreprise sera effectuée et les actions ainsi émises seront rachetées progressivement, de manière que l’enfant repreneur puisse payer le prix de vente à même les revenus futurs de l’entreprise ou sa prise de valeur. Ainsi, dans un souci d’équité familiale, outre la convention de vente d’actions ou d’actifs, un vendeur avisé s’assurera que le repreneur lui consente de bonnes et valables garanties de paiement.
Le conseil de famille
La mise en place d’un conseil de famille permettra d’éviter certains écueils lorsque viendra le temps de passer le flambeau à la deuxième ou troisième génération. Dans ce conseil, l’avenir de l’entreprise ainsi que les intérêts de chacun des membres de la famille seront entre autres discutés. Outre les conseils de famille réguliers où il sera question de l’évolution de la mise en œuvre de la relève, la signature de contrats d’emplois et la mise en œuvre d’une stratégie fiscale permettront d’amenuiser les sentiments d’iniquité entre un enfant repreneur et un autre qui n’est pas impliqué dans l’entreprise.
Quand impliquer la relève ?
Aussi, impliquer un enfant dans l’entreprise familiale assez tôt lui permettra d’acquérir une connaissance plus complète de l’entreprise et de développer une relation solide avec les employés. D’un autre côté, cela pourrait lui permettre de découvrir rapidement qu’il n’est pas intéressé par l’entreprise familiale, ce qui laisserait au parent cédant suffisamment de temps pour mettre en œuvre un autre plan de relève.
La relève interne
Une reprise interne c’est lorsqu’un ou plusieurs employés de l’entreprise prennent la relève. La première qualité d’un plan de relève interne est sans contredit sa capacité à être adapté à une réalité qui évolue constamment. En effet, entre l’identification des personnes clés pouvant faire partie d’un plan de relève et la vente de l’entreprise au repreneur interne, plusieurs années peuvent s’écouler et les personnes identifiées comme repreneur peuvent varier en raison d’une multitude de facteurs.
Développer une relève investie
Il est important pour un cédant de s’assurer que le repreneur, une fois identifié dans l’entreprise, y demeure et qu’il ait un intérêt à prendre les rênes. À cet effet, une convention entre actionnaires prévoyant un transfert progressif de participation ou un régime d’intéressement d’employés clés peuvent constituer des outils intéressants. Ceux-ci permettent d’augmenter graduellement la participation des employés sur une base méritoire, tout en s’assurant de moduler la modalité de prise de décision jusqu’au moment prévu pour le transfert. Cependant, il est primordial de discuter sérieusement de chacun des termes de la convention entre actionnaires afin d’éviter qu’une clause ne permette de précipiter un transfert d’entreprise contre la volonté de l’actionnaire fondateur.
La transition
Plus la relève sera expérimentée lors de la clôture de la transaction, moins importante sera la nécessité pour le vendeur de demeurer comme consultant après la transaction. En ce qui concerne les diverses représentations et garanties effectuées par le vendeur dans le cadre du transfert, celles-ci peuvent varier grandement en fonction de l’implication des acheteurs dans la gestion quotidienne de l’entreprise et leur connaissance des activités durant les années précédant la transaction.
La relève externe
Représentations et garanties
Il se peut qu’un matin, sans aucune sollicitation de votre part, une tierce partie vous fasse part de son intérêt à acquérir votre entreprise et vous fasse une offre difficile à refuser, mais cette situation est rare. La plupart du temps, le vendeur se tournera vers le marché externe lorsqu’il conclut qu’il n’y a aucune relève familiale ou interne. Ce genre de transaction pourra comporter de nombreuses représentations et garanties qu’un vendeur avisé pourra négocier.
Clauses d’ajustement de prix
À titre d’exemple, une négociation serrée permettra d’insérer des clauses d’ajustement de prix permettant d’ajuster à la hausse le prix de vente de manière rétroactive lorsque des objectifs de vente continuent d’être atteints pendant une période donnée, ou à la baisse si les ventes prévues ne se concrétisent pas. Ces types de clauses sont de plus en plus courantes lorsque le vendeur demeure dans l’entreprise pour une période s’étendant sur quelques années, notamment lorsque l’acheteur agit comme investisseur à moyen ou long terme et qu’il n’a personne pour diriger l’entreprise.
L’importance de rester à jour
Une reprise externe pouvant survenir à tout moment, il est d’une importance capitale de maintenir votre entreprise en ordre, ne serait-ce que pour vous permettre d’utiliser votre exemption d’impôts sur une partie du gain en capital, ou tout simplement d’être en mesure de fournir rapidement toute la documentation nécessaire dans le cadre d’une vérification diligente.
Trop souvent, une réorganisation fiscale sera préparée de manière à réduire l’impôt payable lors d’un transfert, ou à le différer, alors que les critères permettant de profiter de l’exemption d’impôt sur le gain en capital ne sont pas respectés. À d’autres occasions, des baux entre sociétés liées ne sont pas rédigés, ou les livres de minutes ne sont pas à jour et tout doit être préparé rapidement lors de la vente de l’entreprise. Ces situations peuvent devenir des points de négociation pour un acheteur dont le vendeur se serait bien passé !
Pour conclure, la préparation de la relève débute dès lors que l’entreprise se développe et que des employés s’y joignent. Il est primordial d’être accompagné par des professionnels qualifiés dans la planification à brève comme à longue échéance pour que vous puissiez tirer le maximum de rendement dans l’énergie que vous avez déployée dans votre entreprise pour la faire prospérer.
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