Le 18 février dernier, le CTEQ organisait un webinaire en collaboration avec Femmessor sur le thème : Acheter une entreprise en période d’incertitude. Lors de cet événement, quelques questions posées par les participants n’ont pu être couvertes faute de temps. Découvrez dans cet article, les réponses apportées par les conférenciers et d’autres experts aux questions restées en suspens pendant le webinaire.
Vincent Lecorne, président-directeur général, Centre de transfert d’entreprise du Québec
Est-ce que les statistiques émises par M. Lecorne émanent toutes de Statistique Canada ou elles proviennent d’autres sources ?
Les chiffres concernant les intentions de transfert proviennent de Statistique Canada. Les données quant au vieillissement des entrepreneurs et de l’âge moyen des entrepreneurs au Québec proviennent du recensement de 2016 de Statistique Canada.
Finalement, les statistiques évoquées quant aux possibles fermetures d’entreprise proviennent de la note de recherche de janvier 2021 de la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante intitulée : Entreprises et emplois à risque au Canada en raison de la COVID-19.
Parmi les 15 000 entreprises, quel pourcentage sont des TPE, PME et grande entreprise ?
- Le chiffre de 15 000 est une approximation, donc il ne faut pas oublier que l’on parle d’environ 15 000 entreprises (plus précisément entre 15 050 et 15 200 entreprises qui ont l’intention de transférer). En ce sens, toujours selon les récentes données de Statistiques Canada, on peut estimer qu’au Québec c’est environ : 7 800 entreprises de 1 à 4 employés qui ont l’intention de transférer en 2021
- 5 800 entreprises de 5 à 19 employés ont l’intention de transférer en 2021
- 1 300 entreprises de 20 à 99 employés ont l’intention de transférer en 2021
- 120 entreprises de 100 employés ou plus ont l’intention de transférer en 2021
Nathalie Boudreau, conseillère en transfert d’entreprises touristiques, Centre de transfert d’entreprise du Québec
Comment réussir à trouver des opportunités de reprise au sein de l’industrie touristique ?
La première étape est de s’inscrire et de consulter l’INDEX du CTEQ. Cette plateforme compte plus d’un millier d’entreprises à vendre partout au Québec.
Cependant, malgré la pandémie, il ne faut pas s’attendre à acquérir une entreprise à rabais. La plupart des cédants qui sont prêts à vendre sont propriétaires depuis plusieurs années et ont su faire face à ce ralentissement de clientèle, voire profiter de l’affluence des touristes québécois.
Cela dit, les cédants sont toutefois conscients des difficultés qu’auront à surmonter les repreneurs en cette période particulière et ils feront tout leur possible pour faciliter le transfert.
À lire aussi :
L’INDEX, un puissant outil de recherche au service des vendeurs et acheteurs d’entreprise
Je souhaite acheter une entreprise : comment faire mes recherches activement ?
Pour les restaurants quels sont les enjeux d’achat ?
Trouver du financement pour ce secteur d’activité compte habituellement des défis et la pandémie n’aide en rien. Ensuite, le manque de main-d’œuvre est un problème auquel les restaurateurs font face en temps normal. De plus, en raison du contexte actuel, les employés de la restauration se sont réorientés pour la plupart, donc, les propriétaires doivent s’attendre à travailler de longues heures.
Quel message lanceriez-vous aux entrepreneurs/repreneurs des domaines du tourisme ?
Plusieurs secteurs du tourisme ont la cote. Les Québécois(es) ont envie de découvrir leur Québec : le plein air, le sentiment de liberté, le goût de vivre des expériences, pour ne nommer que quelques exemples.
Soyez créatifs, unissez-vous dans vos régions pour vous assurer une offre touristique intéressante. Vous avez tous besoin les uns des autres pour traverser cette tempête !
À consulter :
Vendre une entreprise touristique : les enjeux et les possibilités
Le transfert d’entreprises touristiques au temps de la COVID-19
Guylaine Vézina, propriétaire, Boutiques Twist à Saguenay
Acceptez-vous des artistes qui sont en dehors des régions où sont vos boutiques ? Mais toujours au Québec bien sûr.
L’artisan peut nous contacter directement par téléphone à nos bureaux au 418 512-1818 ou nous proposer ses services par courriel à : . Lorsque les produits nous intéressent, nous expliquons les modalités, termes et conditions de vente à l’artisan et si nous nous entendons, nous signons une entente.
Comment est-ce que le potentiel de développement que vous avez constaté dans votre entreprise a influencé votre prix d’achat ? Vous êtes-vous basée seulement sur les états financiers ou étiez-vous prête à payer plus cher pour le potentiel ?
Je me suis basée beaucoup sur les états financiers, le domaine d’activités et l’état actuel de l’entreprise. Mon potentiel de développement provient de mes idées, mon bagage et ma vision du domaine des affaires afin de faire prospérer et accroître l’entreprise, ce qui est n’est pas attribuable à l’ancienne propriétaire, mais à moi seule.
Est-ce que vous avez dû négocier une balance de vente pour permettre la transaction ?
Oui, je l’ai négocié, et ce fut très facilitant, ne serait-ce que pour attacher l’ancien propriétaire aux résultats futurs et aux obligations. Cependant, la transaction aurait eu lieu quand même.
Est-il déjà arrivé à Guylaine de se planter en repreuneuriat, malgré son « flair » et son intuition ? Si oui, comment gérer l’impact sur les collaborateurs afin de conserver la relation ?
Tout est une question de communication et de perception. Lorsque nous établissons un climat de confiance et de respect dès le départ et que les choses sont claires entre le cédant et le repreneur, la relation va très bien par la suite, même si l’acquisition de l’entreprise n’a pas pu s’effectuer. C’est la vie !
Est-ce que les employés, fournisseurs artisans en place savaient que l’entreprise était à vendre avant l’achat par Guylaine ?
Non. Les fournisseurs ont été avisés après mon entrée du 1er octobre 2020. Pour les employés, ils ont été mis au courant lors d’une réunion de l’équipe, un mois avant mon entrée du 1er octobre.
Vicky Pronovost, Associée, Mallette
Peut-on financer 100% de l’achat d’une entreprise ? Est-ce une bonne idée ?
Il est rare que l’on voie une acquisition d’entreprise financée à 100%. Souvent, les banquiers veulent voir l’entrepreneur prendre des risques également.
Souvent, les liquidités provenant des profits générés par l’entreprise ne sont pas suffisantes pour payer le capital et les intérêts d’un financement à 100%.
Vous pouvez obtenir une portion équité (investissement en capital-actions) provenant de certains prêteurs afin d’alléger la portion de la dette à rembourser.
La structure financière dépend principalement de la solidité financière de l’entreprise, de sa capacité à générer des profits et des actifs à donner en garantie.
Dans une perspective de reprise d’entreprise, au regard des banquiers et autres acteurs financiers, quelle est la crédibilité du repreneur s’il a été essentiellement « Intrapreneur » durant sa carrière ?
Un intrapreneur est un employé qui développe l’entreprise, c’est quelqu’un qui innove. Donc, en principe les banquiers et financiers voient d’un bon œil un employé à l’interne qui a le sens de développer l’entreprise. Si l’intrapreneur propose un bon plan de match pour la poursuite de l’entreprise, démontre qu’il a une vision, qu’il est sensible aux résultats financiers, et qu’il peut s’adjoindre des collaborateurs pour l’aider dans ses faiblesses, tout devrait bien se passer.
Bien s’entourer pour une transaction peut coûter combien en matière de pourcentage de la valeur de la transaction ?
Il existe plusieurs organismes qui offrent de l’accompagnement gratuitement ou à peu de frais (CTEQ, Femmessor, CLD, SADC, etc.). C’est difficile de chiffrer des honoraires, car il y a une partie qui est difficile à déterminer, soit le temps consacré aux négociations qui peut être court, comme très long. Pour certaines transactions, vous allez avoir besoin de prévisions financières complètes pour obtenir du financement, alors que pour d’autres transactions vous n’en aurez pas besoin. L’important, c’est de prendre le temps de trouver un bon professionnel qui a de l’expérience en transaction. Vous devez être à l’aise avec le professionnel choisi de discuter d’honoraires et d’avoir une discussion franche.
Est-ce un bon moment pour vendre ou il est préférable d’attendre… puisque les bénéfices ne sont pas nécessairement au rendez-vous ?
Ça dépend du secteur et de la raison justifiant pourquoi les bénéfices ne sont pas au rendez-vous. Est-ce simplement la COVID ? Est-ce qu’après la COVID, votre produit ou service va revenir à la normale ou il pourrait y avoir une modification des habitudes des consommateurs qui étaient ciblés par votre produit ou service, à la baisse ? Est-ce que votre historique de profit (cinq dernières années) est assez stable ou en dent de scie ? Si vous êtes capables de démontrer le retour des profits après la pandémie, vous pourriez tenter votre chance, mais les négociations peuvent être plus ardues et il pourrait y avoir des clauses d’ajustement de prix de la part de l’acheteur conditionnel au retour des profits. Cependant, si vous attendez, cela vous permettra de prouver à un acheteur que les profits sont de retour et les négociations pourraient être plus faciles.
Est-ce que les sources de financement pour un repreneuriat sont autant disponibles maintenant qu’avant la pandémie ? Est-ce que les bailleurs de fonds sont compréhensifs en vue d’une baisse des ventes et des profits qui seraient causés par la pandémie ou bien est-ce qu’ils demandent de plus grandes mises de fonds ?
Oui, les institutions financières ont des fonds disponibles pour financer des acquisitions. La vitesse du retour à la profitabilité va avoir un impact important sur le montant de financement. Il en faut comprendre qu’un prêteur veut s’assurer d’être remboursé dans les délais prévus. Donc, selon votre secteur, les actifs à donner en garantie, la vitesse de retour à la normale, la solidité du repreneur et son bilan personnel vont avoir un impact sur le montant du prêt.
Comment calculer l’impact des subventions salariales aux états financiers ? Il est difficile dans une entreprise en croissance de voir si l’impact de la subvention aux états financiers est un avantage ou désavantage en fonction des profits vraiment perdus.
Premièrement, il faut demander au vendeur s’il n’est pas indiqué clairement dans les états financiers, toutes les subventions reçues en lien avec la pandémie. Une bonne analyse financière mensuelle historique (24 mois minimum) avant la pandémie et les mois après la pandémie (sans les subventions), est nécessaire pour comprendre la rentabilité mensuelle de l’entreprise (stable ou cyclique). Elle peut permettre d’évaluer l’impact des subventions salariales. Bref, en comparant, mensuellement sur trois ans, exemple avril 2018, avril 2019 et avril 2020 (pandémie) cela permet d’évaluer l’impact de celle-ci sur les profits perdus.
J’ai déjà eu l’expérience de rachat d’entreprise dans le domaine manufacturier avec l’apport nécessaire (mise de fonds) et balance de 25% du prix négocié avec le vendeur. Mais aucune banque ne s’est avancée dans ce contexte de pandémie. Quelle est la position des banques pour le financement ? Sachant que ce contexte est là pour un bon moment !
Ça dépend du secteur manufacturier, des projets pour la reprise, de sa capacité actuelle à payer de nouvelles dettes, des actifs qu’elle peut donner en garantie. Il faut prendre le temps de regarder le dossier avec plusieurs institutions financières, car leur tolérance au risque pour certains secteurs peut être différente d’une banque à l’autre. Il est souvent intéressant de demander à deux institutions financières de partager le risque. Exemple : banque traditionnelle avec BDC, ou IQ, Fonds régionaux FSTQ, CSN, Desjardins Capital de risque, DEC Canada, etc.
En tant que repreneur individuel, comment se différencier par rapport à un acheteur stratégique ?
L’acheteur stratégique peut être prêt à payer un peu plus cher une transaction, sachant qu’il réalisera des économies par la suite, donc il faut en être conscient. Vous n’avez pas intérêt à payer une entreprise trop cher, donc il est important de bien évaluer le projet. Vous pourrez vous différencier par votre connaissance de l’entreprise et du secteur, votre leadership, votre solidité financière (personnelle), les projets que vous désirez réaliser avec cette entreprise.
En tant que repreneur, je trouve que les entreprises québécoises ont un prix très élevé par rapport à leur BAIIA. Comment travaillez-vous avec les cédants pour gérer leurs attentes en ce qui concerne la valeur de leur entreprise ?
Lorsque j’établis la valeur d’une entreprise avec un cédant, je regarde toujours dans une 2e étape la capacité de l’entreprise à financer la transaction selon le prix établi. Par cet exercice, le cédant est en mesure de comprendre, combien l’acheteur pourrait obtenir d’une institution financière et combien l’acheteur devra mettre de sa poche pour acquérir l’entreprise. Si l’acheteur n’a pas ce montant, je lui explique que c’est lui qui pourrait avoir à demeurer en balance de vente. Cet exercice permet de conscientiser le cédant, surtout s’il veut vendre à ses employés qui souvent n’ont pas de fortune personnelle à investir.
Si l’entreprise que j’aimerais acheter avait dû avoir de meilleurs résultats en raison de la pandémie, mais que dans les états financiers il n’y avait pas de croissance est-ce une bonne idée d’acheter ?
La première étape est de bien comprendre pourquoi les résultats n’ont pas été au rendez-vous. La réponse à cette question permettra de déterminer si c’est une bonne idée ou non.
Visionnez le webinaire complet ici.
N’hésitez pas à communiquer avec nous pour toute question !